Les primaires du New Hampshire enregistrent une participation record. Les résultats inversent ce que d’aucuns qualifiaient de nouvelle tendance : Hillary Clinton l’emporte sur son rival, Barack Obama, avec une mince majorité : 39 % des votes contre 37% pour Barack Obama. À ou vers 22h30, mardi soir, CNN prévoyait déjà la victoire de la sénatrice Hillary Clinton. C’est le retour du balancier. Les électeurs du New Hampshire ont fait mentir les sondages. L’avertissement de madame Clinton : « Les démocrates doivent choisir et élire un président qui agit, non pas un président qui se contente de parler » a donné des fruits. Les électeurs du New Hampshire lui ont manifesté, par une faible majorité, leur préférence au candidat, Barack Obama.

D’après le dernier sondage Reuters, dévoilé mardi, Barack Obama était crédité de 42% des intentions de vote, loin devant Hillary Clinton (29%) et John Edwards (17%). Chez les républicains, John McCain était crédité de 36% des intentions de vote, contre 27% à son concurrent pour l’investiture républicaine, Mitt Romney.

Pas de surprise du côté républicain : le sénateur John McCain sort vainqueur de cette course avec 37%, devant Mitt Romney qui pointe, lui, à 32 %. Mike Huckabee termine en troisième position avec 11% des votes.

Contrairement au système des caucus, en vigueur dans l’Iowa, par exemple, où les électeurs d’un même parti se réunissent, discutent et s’assemblent par affinité, les primaires ressemblent davantage à une élection normale avec isoloirs, bulletins de vote et urnes. Le New Hampshire organise des primaires semi « ouvertes ». Les électeurs qui ne sont inscrits dans aucun parti peuvent participer à la primaire démocrate ou républicaine. En revanche, les électeurs inscrits comme républicains ou démocrates ne peuvent voter dans la primaire de l’autre parti. Environ 850.000 électeurs figuraient sur les listes électorales du New Hampshire répartis comme suit : 26% de démocrates, 30% de républicains et 44% d’indépendants (électeurs inscrits qui ne sont affiliés à aucune des deux grandes formations politiques. La loi de l’État leur permet de participer à la primaire de leur choix, à condition qu’ils ne votent qu’une fois). En 2004, près de 220.000 électeurs avaient participé aux primaires destinées à départager les candidats démocrates. Historiquement, les primaires du New Hampshire, qui suivent traditionnellement les caucus de l’Iowa, ont exercé une grande influence sur le processus de sélection des candidats. Cinq jours après les surprises de l’Iowa, le New Hampshire se démarque en faveur de la sénatrice Hillary Clinton.

Fait intéressant à noter, Rudy Giuliani a pris le risque de laisser filer la victoire en faisant peu campagne dans l’Iowa et le New Hampshire, réservant ses forces pour des États plus peuplés comme la Floride. Il a récolté 9% des votes.

Lundi, Marianne Pernold Young, de Portsmouth, avait posé une question à la sénatrice Clinton : « Est-ce que la campagne des primaires n’était pas trop cruelle ? » Cette électrice du New Hampshire ne croyait certainement qu’elle serait, à cause de sa question, sur la sellette dans le monde entier. Ce n’est pas la question qui a troublé l’Amérique. Mais la réponse de la sénatrice Clinton, au bord des larmes : « Ce n’est pas facile et je ne pourrais pas le faire si je ne croyais pas passionnément à ce je fais. Ce pays m’a donné tant de chances que je ne veux pas nous que revenions en arrière ». Sur CNN, quelques heures plus tard, Hillary Clinton estimait que les personnalités politiques pouvaient manifester des émotions : « Nous avons vu au cours des années des figures politiques masculines qui ont tout fait, des pleurs jusqu’aux cris, et qui ont été nos présidents », a-t-elle soutenu. Elle s’est dite « résistante » et en mesure de garder son « calme en tant de crise ». Comme l’indique l’universitaire Barbara Kellerman, citée par Le Monde : « Hillary, contrairement aux candidats hommes, doit trouver le ton juste et le difficile équilibre entre fermeté du discours et féminité ». Son vote de 2002 au Congrès en faveur de la guerre en Irak la fait apparaître bien plus dure en matière de sécurité nationale que certains de ses rivaux.

Les enjeux au New Hampshire étaient importants et lourds de conséquence. Une larme, un moment d’émotion vive, comme le montre ce clip du réseau ABC, qui ont été abondamment traités dans la presse américaine et internationale. Et sur le Net. Était-ce là un court instant de faiblesse de cette Dame qui veut occuper la Maison Blanche ? Hillary Clinton avait promis qu’elle combattrait jusqu’au bout. Le lendemain, le Boston Herald, un quotidien du New Hampshire, populaire et très lu, avait montré la photo de madame Clinton avec ce titre : « She’s so yesterday » (Elle est dépassée!). Il semble bien que les électeurs du New Hampshire en ont décidé autrement. Cette combattante a gagné le terrain. Elle a sillonné, dans son bus bleu de campagne, les abords de plusieurs bureaux de vote dont une école à Nashua où plusieurs partisans, émus, l’ont enlacée.

Selon plusieurs blogs américains, qui suivent de près cette campagne américaine, Hillary Clinton aurait pu se retirer de la course à l’investiture démocrate. Toutefois, la blogosphère démocrate est partagée. Comme le rapporte Libération : « Jerome Armstrong, de MyDirectDemocracy, propose une analyse à contre-courant de l’ “Obamania” ambiante. Le blogueur concède qu’Obama a de fortes chances de remporter le Michigan (15 janvier), le Nevada (19 janvier) et la Caroline du Sud (26 janvier). Hillary Clinton, en revanche, peut compter sur la démographie de l’État de Floride (avec un électorat plus âgé) où se tient la primaire du 29 janvier. Si elle gagnait cette primaire, elle retrouverait l’élan qui lui manque ce soir pour aborder le Super Tuesday du 5 février, où elle conserve toutes ses chances ». Armstrong avait vu juste.

Cet élan, il ne fait plus de doute que madame Clinton l’aura retrouvé. Dans l’allégresse. Elle avait prévenu ses troupes : « Et vous savez, quoi qu’il arrive demain », avait déclaré, lundi, Hillary Clinton, à CBS, « on va continuer, et jusqu’à la fin du processus le 5 février ». Madame Clinton cherchera, semble-t-il, à survivre jusqu’au 5 février prochain, date du « méga mardi » (Super Tuesday) où 22 États choisiront leur candidats et où les noms des deux candidats de chaque camp seront connus : « Je considère que le moment décisif arrivera à minuit sur la côte ouest le 5 février, parce qu’il va falloir attendre jusque-là pour vraiment voir comment tout ça va tourner ». Entre temps, le secrétaire d’État du New Hampshire, chargé des élections, Bill Gardner, a qualifié la participation de « très importante ». C’est pourquoi Hillary Clinton a clamé, au soir de sa victoire : « Now together, let’s give America the kind of comeback that New Hampshire has just given me ». Et Ben Logan, un étudiant de Nashua, cheveux ras et sweet à capuche, partisan de Barack Obama, n’en croit pas ses yeux. « Je ne comprends pas. Les sondages l’annonçaient en tête. Peut-être qu’on s’est monté la tête après l’Iowa » (Libération).

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