mardi 29 janvier 2008

« Il y a des Noirs et des Blancs, des Latinos, des Asiatiques et des Indiens ». Il y a Barack Obama!

« Il y a des jeunes et des anciens, des riches et des pauvres. Il y a des Noirs et des Blancs, des Latinos, des Asiatiques et des Indiens. […] Il n’y a pas une Amérique de gauche et une Amérique conservatrice, il y a les États-Unis d’Amérique ». Et il y a Barack Obama. Le candidat démocrate n’est pas seulement le candidat de la minorité noire mais de tous les Américains. Il se déclare comme tel. En rappel, Barack Obama a, en Caroline du sud, obtenu 55% des suffrages, devançant très largement Hillary Clinton (27%) et le troisième prétendant John Edwards (18%). Si sa victoire était attendue dans cet État, l’écart qu’il a creusé avec Hillary Clinton dépasse largement toutes les prévisions.

Il semblerait que les Clinton souhaiteraient susciter une impression de vote racial en faveur d’Obama afin de déclencher un rejet chez la majorité blanche qui s’exprimera le 5 février lors du Super Tuesday. Pour Bill Clinton, l’adversaire de son épouse est un « candidat noir ». En tant que tel, sa victoire est donc, selon Bill Clinton, similaire aux deux victoires du bouillant leader noir, Jesse Jackson, dans ce même État en 1984 et 1988. Jackson avait échoué à l’investiture. Des éditorialistes s’interrogent sur les dérives « indignes de cet ancien président ». Interrogée sur la chaîne CBS, à des propos de ces dérives de son mari, à l’encontre d’Obama, et de leurs possibles conséquences, Hillary Clinton a reconnu que son mari Bill « s’était un peu emporté ». « Mais cela arrive dans une élection très disputée », a-t-elle fait valoir.

Caroline Kennedy souhaite, dans le New York Times, un président à l’image de son père : « Je n’ai jamais eu un président qui m’a inspiré de la façon dont les gens m’ont dit que mon père les avait inspiré. Mais pour la première fois, je pense avoir trouvé l’homme qui pourrait être ce président - pas seulement pour moi mais pour une nouvelle génération d’Américains ». Tout en poursuivant : « I want a president who understands that his responsibility is to articulate a vision and encourage others to achieve it; who holds himself, and those around him, to the highest ethical standards; who appeals to the hopes of those who still believe in the American Dream, and those around the world who still believe in the American ideal; and who can lift our spirits, and make us believe again that our country needs every one of us to get involved ».

Barrack, le rassembleur! C’est ainsi qu’il veut être perçu. Après huit ans de présidence Bush et de batailles idéologiques stériles ou de guerres injustifiées, Barack Obama déclare que les Américains ont besoin qu’on leur parle de coalition et qu’on les berce de changement. Ce gamin représente à lui seul le rêve de l’Amérique. Il a gravi un à un les échelons de la société américaine pour se hisser jusqu’à la candidature à la présidence. Et comme l’écrit Isabelle Duriez, de Libération : « Obama peut remercier Bush dans ses prières. Sans lui, l’Amérique ne chercherait pas un réconciliateur, voir même un rédempteur. Un homme capable de rassembler les hommes et les femmes (un tiers des électrices ont voté pour lui et non pour elle), les Noirs et les Blancs, les bleus (démocrates) et les rouges (républicains)… Un homme qui pardonne le pêcher originel de l’esclave et qui tend à l’Amérique un miroir dans lequel elle se trouve belle, multiraciale et efficace. Un homme qui soignera la plaie béante de la guerre en Irak et restaurera l’image de l’Amérique dans le monde. Le danger, quand on incarne un tel espoir, est de décevoir ».

Après Caroline Kennedy, la fille de John F., Barack Obama est adoubé à un autre Kenney, représentant d’une autre grande « dynastie » démocrate, le vétéran sénateur Edward Kennedy, qui explique sur son blogue les raisons de cet appui. La présence des Kennedy ne suffira peut-être pas à le propulser en tête de liste du « Super Mardi ». Selon la presse américaine, M. Kennedy a basculé dans le camp Obama après avoir été ulcéré par le ton de la campagne, et particulièrement les attaques de Bill Clinton, accusé par certains d’avoir introduit le facteur racial dans le débat, comme nous l’avons déjà mentionné ci-haut. Selon le New York Times, M. Kennedy et Bill Clinton auraient eu récemment un vif échange téléphonique. Qu’à cela ne tienne, le clan Kennedy, qui conserve depuis des années une importante influence sur la vie politique américaine, est divisé sur l’investiture démocrate. La fille du sénateur Robert F. Kennedy, Kathleen Kennedy Townsend, donne son appui à la sénatrice démocrate, Hillary Clinton, qui « serait le meilleur choix possible pour la présidence ».

Au cours de ce scrutin capital, du 5 février, le « Super Tuesday », où des scrutins sont organisés dans 22 des 50 États, les hispanophones de la Californie représenteront un électeur sur quatre et joueront un rôle déterminant dans le choix du candidat démocrate. Hillary Clinton jouit d’une confortable avance de trois contre un face à Barack Obama, selon un récent sondage réalisé par l’Institut de politique publique de Californie. Ce vote hispanophone n’est pas uniforme. Les jeunes pourraient être plus attirés par le renouveau, incarné par Barack Obama, alors que les plus âgés préfèreront l’expérience d’Hillary Clinton, selon les analystes.

Les femmes, dans l’électorat américain, sont l’objet d’une cour assidue de la part des deux candidats démocrates. Elles ont joué un rôle clé dans les deux premières étapes de la course à l’investiture démocrate. Selon les sondages, toutefois, Hillary Clinton serait en tête des intentions de vote chez les femmes. La stratégie, que met de l’avant Barack Obama pour gagner le vote des femmes, est de s’assurer qu’elles connaissent bien son bilan sur des questions importantes pour elles. « Pas seulement l’égalité des droits et de salaire ou des questions comme la garde des enfants et l’éducation des jeunes enfants, mais aussi les opportunités (économiques) qui sont à bien des égards inégales », se plaît-il à souligner. Hillary Clinton, pour sa part, leur adresse le message suivant : « J’ai trouvé ma voix en vous écoutant et je vais porter votre voix à la Maison Blanche », explique sa conseillère, Ann Lewis. « Elle est le genre de leader qu’elles désirent : quelqu’un qui les entend et parle pour elles ».

Autant Hillary Clinton doit montrer qu’elle a l’étoffe d’une présidente, autant Obama doit se défendre contre des préjugés tenaces. Hillary doit se défendre contre la présence lourde et omniprésente de Bill, son mari, et du rôle que ce dernier jouerait au sein de la Maison Blanche. Cette polémique sur le rôle de Bill n’est pas anodine : certains adversaires d’Hillary Clinton, tous camps confondus, la raillent en la surnommant « Billary ». Il est vrai que l’ancien locataire de la Maison-Blanche fait activement campagne en faveur de son épouse, comme il l’a si bien démontré en Caroline du Sud.

Barack Obama est souvent vu et calomnié comme « un infiltré des islamistes radicaux qui veulent prendre le contrôle des États Unis ». Certains commentateurs n’hésitent pas à lui prêter des intentions plutôt machiavéliques : « Comme il est plus convenant d’être un chrétien lorsqu’on recherche un poste d’élu politique aux États Unis, Obama a adhéré à l’Église Unie du Christ pour bien camoufler le fait qu’il est toujours musulman », pouvait-on lire dans certains courriels diffusés en chaîne. De pareilles dérives étant inévitables, il n’est pas surprenant d’entendre des voix s’élever pour jurer que « si Obama est élu, il prêtera serment sur le Coran » et non la Bible, comme c’est la tradition aux États Unis. Il faut savoir qu’il y a environ six millions de musulmans aux États Unis. Et selon les experts, un musulman n’a presque pas de chance d’être élu à la Maison Blanche.

Avant les primaires démocrates en Caroline du Sud, qui ont donné la victoire à Barack Obama, il est intéressant de noter ce qu’en disait le South Carolina’s State qui a donné son appui au candidat noir : « Le sénateur Barack Obama nous apparaît comme le meilleur choix pour les primaires démocrates […] Monsieur Obama serait également le seul candidat capable de restaurer l’image des États-Unis à l’étranger, notamment en fermant la prison de Guantanamo qui a endommagé les valeurs morales des États-Unis ». Et pourquoi Barack Obama, au lieu d’Hillary Clinton? Voici la réponse du quotidien : « Mme Clinton a démontré qu’elle était intelligente et dotée d’une profonde compréhension de beaucoup de problèmes », écrit le quotidien avant d’ajouter « mais nous imaginons bien ce que serait une présidence Clinton ». « Le retour des Clinton à la Maison-Blanche relancerait une nouvelle vague de polémiques politiciennes. Ce ne serait pas la faute de Bill et Hillary, mais c’est ainsi ».

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