Barack Obama, le démocrate, surfe sur les résultats du dernier sondage du plus important quotidien de l’Iowa, The Des Moines Register : « There comes a moment in each generation », affirme-t-il. « This is our moment. This is our time », clame-t-il au grand enthousiasme de ses partisans (Huffington Post). Et les attaques contre la présidence de Georges W. Bush viennent d’un républicain : « President Bush didn’t read it for four years ; I don’t know why I should read it in four hours », déclare Mike Huckabee, en réponse au candidat républicain Mitt Romney qui l’accusait de ne pas avoir lu : « the National Intelligence Estimate on Iran », le mois dernier. C’est ce même Mike Huckabee qui a qualifié l’attitude de la Maison Blanche, depuis l’arrivée de Georges W. Bush, d’arrogante. Les jeux sont faits, rien ne va plus !
La saison des primaires s’ouvre avec l’Iowa qui sera, ce 3 janvier 2008, sous les feux des médias du monde entier, et le 8 janvier, au New Hampshire. Ce 3 janvier 2008 marquera donc aux États-Unis le coup d’envoi des caucus pour le choix des candidats aux prochaines présidentielles américaines. Les militants de chaque parti éliront ainsi leurs délégués aux niveaux des comtés, des districts et des États.
Comme nous l’indique Wikipedia, le nom de l’État vient d’un mot amérindien signifiant « beau pays ». La plupart des postes élus de l’exécutif de l’état sont détenus par des démocrates. Le gouverneur actuel est le démocrate Chet Culver, élu gouverneur en novembre 2006 avec 54 pour cent des voix contre 44 pour cent au républicain Jim Nussle. Depuis des mois, les candidats démocrates et républicains sillonnent sans relâche les 99 comtés de l’Iowa. Aucun village n’est trop reculé, aucune salle trop petite pour qui veut conquérir la Maison Blanche. Fin octobre, on estimait que 25 pour cent des quelque trois millions d’habitants de l’Iowa avaient serré la main d’au moins un candidat (AFP).
En Iowa, peuplé de près de trois millions d’habitants, les analystes prennent en compte tous les facteurs qui pourraient favoriser les uns, défavoriser les autres. Selon le Nouvel Observateur, les statistiques démographiques pourraient favoriser Mme Clinton : en effet, lors de la présidentielle de 2004, 55 pour cent des participants aux caucus avaient plus de 55 ans tandis que seuls 11 pour cent d’entre eux avaient moins de 34 ans. Les électrices de 55 ans et plus représentaient plus de la moitié des votants contre seulement 18 pour cent pour les électeurs de moins de 50 ans.
Un sondage du réseau CNN/Opinion Research Corp.Hillary montre qu’Hillary Clinton l’emporterait, en Iowa, avec des résultats de 33 pour cent contre 31 pour cent pour Barack Obama et 22 pour cent pour John Edwards. L’écart est serré. Selon CNN, ce sondage indiquerait également que les électeurs de l’Iowa croient davantage que madame Clinton sera à même de remporter les élections générales en novembre prochain. Chez les républicains, Mitt Romney mène dans ce sondage avec 31 pour cent des intentions de vote contre 28 pour cent pour Mike Huckabee.
Le sondage du plus important quotidien de l’Iowa, The Des Moines Register, était fort attendu. Les différences de résultat sont saisissantes. Chez les démocrates, le sondage du quotidien place Barack Obama au premier rang des choix des électeurs avec 32 pour cent des intentions de votes contre 25 pour cent pour Hillary Clinton et 24 pour cent pour John Edwards. Par ce choix, les électeurs indiquent clairement leurs préférences : « They prefer change and unity over other leadership characteristics », écrit Des Moines Register. Le changement et l’unité sont à l’ordre des priorités du jour en Iowa, même si les électeurs considèrent à 37 pour cent que madame Hillary Clinton est la plus apte à gouverner le pays, contre 28 pour cent pour Barack Obama. Chez les républicains, Mike Huckabee mènerait avec un résultat de 32 pour cent des intentions de vote contre 26 pour cent pour Mitt Romney, 13 pour cent pour John McCain et 5 pour cent pour Rudolf Giuliani. Le sondage du quotidien The Des Moines Register a provoqué l’ire et le scepticisme des rivaux de Barack Obama. Ce sondage ne peut pas être pris au sérieux, clament-ils. Ils remettent en cause sa méthodologie. Huckabee semble avoir peu de chances dans le New Hampshire le 8 janvier prochain, là où un sondage donne M. John McCain en tête des intentions de vote, côté républicain, devant Mitt Romney.
The Des Moines Register s’est, également, interrogé sur les motifs qui guideraient le choix des électeurs en faveur d’un candidat ou d’un autre. Le motif religieux est au premier rang des préoccupations : seulement 32 pour cent des partisans démocrates ont indiqué que ce motif ne primerait pas dans leur choix. En contrepartie, 59 pour cent des électeurs auront à l’esprit une préoccupation religieuse dans leur choix. Ce groupe est réparti ainsi : pour 29 pour cent des électeurs, ce motif est important, pour 18 pour cent, particulièrement important et pour 12 pour cent, très important. Pour les électeurs de l’Iowa, les cinq questions les plus importantes de l’élection présidentielle sont la guerre en Irak (28 pour cent), la santé (22 pour cent), l’économie (22 pour cent), l’immigration (3 pour cent) et le terrorisme (2 pour cent).
Mme Clinton défend son expérience en expliquant qu’il faut choisir quelqu’un « prêt à être président dès son entrée en fonction, qui ira dans le bureau ovale, prendra une profonde aspiration, dira une prière et plongera dans les affaires à régler ». Mitt Romney met en avant son expérience de gestionnaire des jeux Olympiques de Salt Lake City en 2002. « J’ai passé ma vie à régler de gros problèmes, à aider à faire marcher les affaires, pour les jeux Olympiques, à la tête de l’État du Massachusetts. Il est temps de faire quelque chose à Washington », a-t-il dit.
Mike Huckabee a convoqué lundi matin à Des Moines une conférence de presse pour présenter un clip télévisé attaquant Mitt Romney, son grand rival pour l’investiture à la présidentielle américaine de novembre. Il a soudain annoncé qu’il préférait y renoncer pour préserver la dignité de sa campagne, tout en tentant de présenter le clip aux journalistes incrédules. « J’espère que c’est une publicité que l’on ne verra pas dans l’Iowa », leur a-t-il dit. Autour de lui, la pièce était décorée d’autocollants « Assez, c’est assez ». Huckabee voulait ainsi contrer la publicité très négative faite à son encontre par le clan Mitt Romney dans laquelle on voit un bagnard qui sort de prison grâce à Mike Huckabee, l’homme aux 1 033 grâces et commutations de peine lorsqu’il était gouverneur de l’Arkansas. Dans le Wall Street Journal de vendredi, Peggy Noonan, une plume conservatrice, accusait Huckabee de « bien jouer les victimes », et dans l’influent magazine National Review, fief des néo-conservateurs, les commentateurs semblent perpétuellement faire le concours du plus violent anti-Huckabee : la semaine dernière, Rich Lowry mettait en garde ses amis républicains contre la tentation de se faire « Huckara-Kiri » (Cyberpresse).
Pour Dennis Goldford, professeur à l’université Drake en Iowa, la percée de M. Huckabee illustre l’antagonisme entre « Wall Street » et « Main Street », les élites et les « vrais gens » - « il incarne les protestations (des conservateurs) qui ont le sentiment d’avoir été négligés » durant les années Bush. Il ne fait aucun doute que, affaibli par l’arrivée des démocrates au Congrès en 2006, ébranlé par la corruption, les scandales, et gêné par un président impopulaire, le parti républicain est en pleine crise d’identité. A la différence des précédentes campagnes, aucun candidat n’a trouvé, comme Ronald Reagan en 1980 ou George W. Bush en 2000, la formule permettant de rassembler les intérêts religieux, économiques et sécuritaires du parti conservateur. Même le candidat vedette Rudolph Giuliani peine à se mettre en course dans l’Iowa : ses positions modérées sur les sujets sociaux et ses trois mariages, ont du mal à convaincre les conservateurs évangélistes. Il est également à la traîne dans le New Hampshire.
Exprimeo souligne trois grandes caractéristiques du peuple américain qui sera appelé aux urnes en 2008 pour élire son président. « Aux États-Unis, l’idéologie a peu de place. Parce l’idéologie a peu de place, le débat tourne autour des valeurs de vie et le premier réflexe consiste à examiner si le candidat qui les proclame les a respectées. D’où la place importante qui est accordée à la personnalisation des campagnes. Enfin, la politique américaine tourne autour de la réintroduction permanente l’optimisme. En France, le discours consiste à expliquer comment on va retarder l’apocalypse. Aux États-Unis, il s’agit de recommencer le monde ».
Dans les réunions, les gens viennent en famille, parfois avec des bébés. Les habitants de l’Iowa, pour un tiers des fermiers d’origine allemande, ont la réputation d’être des durs à convaincre. Chaque électeur croit avoir son mot à dire et, selon les règles implicites de l’Iowa, c’est la moindre des choses que les candidats viennent leur répondre personnellement. Ni la notoriété, ni l’argent ne constituent nécessairement un avantage. « Mitt Romney a dépensé 20 fois plus d’argent que moi dans l’Iowa. Mais les gens d’ici on les achète pas, on les loue pas non plus », dit un Mike Huckabee ravi de faire la course en tête chez les républicains. Les électeurs de ce petit État rural du centre des États-Unis, scrutés par les médias du monde entier, sont, dit-on, les enfants gâtés de la démocratie américaine.
(Sources : CNN, Cyberpresse, AFP, Reuters, Huffington Post, New York Times, Le Nouvel Observateur, Le Monde).
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