lundi 19 novembre 2007

Pour avancer vers la paix, Israël doit mettre un terme au développement des colonies (B. Kouchner)

Bernard Kouchner aurait-il, une fois de plus, été mal cité ? En visite à Jérusalem, puis par la suite à Ramallah, le ministre a réagi vivement à la publication d’une interview dans Haaretz et à la façon « horrible », selon lui, avec laquelle le quotidien israélien a interprété ses déclarations sur le nucléaire iranien.

Selon le titre du quotidien Haaretz, Paris « n'exclut pas une frappe militaire contre l'Iran ». M. Kouchner s'est dit « vraiment surpris » de découvrir cette position de la France car il allait de soi que l'article de Haaretz supposait erronément un durcissement de la position de Paris face à Téhéran.

La position de la France est « très claire » et « n'a pas changé du tout ». Téhéran a le droit au nucléaire civil mais elle ne peut pas accepter la bombe. Selon le quotidien Haaretz, qui cite Bernard Kouchner : « La France a l'intention de continuer avec une grande détermination sur cette voie, qui est la seule façon de trouver une solution négociée, la seule qui nous empêchera d'avoir un jour à affronter le dilemme de « une bombe iranienne ou bombarder l'Iran ».

Pour rappel, Nicolas Sarkozy avait, le 7 novembre à Washington, réaffirmé que « la perspective d'un Iran doté de l'arme nucléaire (était) inacceptable pour la France » et qu'il fallait « convaincre l'Iran de faire le choix de la coopération, du dialogue et de l'ouverture ».

Le 17 décembre prochain, 80 pays et organisations internationales se réuniront, en principe à Paris, à l'issue de la réunion d’Annapolis, pour financer l'émergence d'un « État palestinien », sous forme d'aides budgétaires et de financement de projets concrets, dans les domaines économiques mais aussi de la justice ou de la sécurité. Bernard Kouchner est à Jérusalem pour parler d’Annapolis qui devrait mener à la conférence (des donateurs) de Paris qui deviendra dès lors le lieu où une certaine consistance sera donnée aux décisions et perspectives acceptées à Annapolis.

La déclaration du ministre Bernard Kouchner sur la réunion de paix d'Annapolis aux États-Unis ne déborde pas d’enthousiasme : « Si la conférence d'Annapolis se tient, ce sera déjà un événement considérable. Si elle ouvre le champ des possibles sur des sujets précis, difficiles, ce sera encore une autre étape pour donner corps à l'idée tant de fois espérée d'un État palestinien ». À l’issue de sa rencontre avec le Premier ministre, Ehud Olmert, et son homologue israélienne, Tzipi Livni, le ministre s'entretiendra avec le président palestinien Mahmoud Abbas et le Premier ministre Salam Fayyad à Ramallah (Cisjordanie). M. Kouchner doit également rencontrer le représentant du quartette international (États-Unis, Russie, UE, ONU) sur le Proche-Orient, l'ancien Premier ministre britannique Tony Blair.

La réunion de paix d'Annapolis, dont il faut dire que ni la date précise ni l'ordre du jour n'ont encore été annoncés, pourrait, selon des sources diplomatiques, avoir lieu le 27 novembre prochain. Les États-Unis n'ont pas encore rendu publique la liste des invitations. En l’absence d’une date et d’une liste des invités (invitées), Bernard Kouchner annonce qu’il se rendra tout de même à Annapolis : « Il y a beaucoup de chances qu'Annapolis se tienne, et que la France y soit représentée par son ministre des Affaires étrangères ». Et la France, selon monsieur Kouchner, y jouera un rôle important : « Le terme de la négociation pour la conférence d'Annapolis est proche, donc les positions se raidissent... il y aura celle (conférence des donateurs) de Paris, qui donnera du corps à tout cela, pour la vie quotidienne des Palestiniens » (RFI).

Selon le chef de la diplomatie saoudienne, Saoud al-Fayçal, les pays arabes se réuniront le 22 novembre pour arrêter une position commune sur leur participation à la réunion d’Annapolis. Le prince Saoud s’est, d’autre part, demandé comment les Israéliens pouvaient aller à Annapolis pour parler de paix « quand dans le même temps ils continuent à construire des murs et des colonies de peuplement ».

Cette position rejoint celle de monsieur Kouchner qui a, dans un entretien publié dimanche par le quotidien palestinien Al-Ayyam, pressé Israël de geler « immédiatement » la colonisation en Cisjordanie qui est selon lui « non seulement juridiquement illégale » mais aussi « politiquement, le principal obstacle à la paix ». « Rien ne justifie le développement des colonies; ni la croissance (démographique) naturelle, ni la sécurité. Au contraire, le développement de la colonisation renforce le sentiment d'injustice et accroît l'insécurité », a déclaré Bernard Kouchner. « Pour avancer vers la paix, Israël doit donc y mettre un terme immédiatement », a poursuivi Bernard Kouchner dans son entretien.

La colonisation, avec 267 500 Israéliens installés en Cisjordanie, est l’enjeu central du conflit, au même titre que les frontières, le statut de Jérusalem et des réfugiés palestiniens. Cette question toutefois n’est pourtant pas inscrite de façon certaine à l’ordre du jour de la réunion d’Annapolis. Israël refuse de négocier sur ce dossier sensible de la colonisation, pomme de discorde entre Israël et la Palestine depuis 1967. MM. Abbas et Olmert doivent se rencontrer, pour la dernière fois, lundi à Jérusalem, avant la réunion d'Annapolis. À propos de ce dernier rendez-vous, avant Annapolis, Bernard Kouchner a déclaré que le Premier ministre, Ehud Olmert, et le président palestinien, Mahmoud Abbas, ont « compris qu'il faudrait accepter des compromis difficiles en échange de la paix et de la sécurité ».

Selon le Nouvel Observateur : « près de deux Palestiniens sur trois (62%) s'attendent à l'échec de la conférence internationale sur le conflit israélo-palestinien qui doit se tenir d'ici à la fin de l'année à Annapolis, près de Washington. C'est ce que révèle un sondage de l'institut de recherches politiques JMCC de Jérusalem-Est, publié lundi. Du côté israélien, l'opinion publique est à peine moins pessimiste : selon une enquête publiée la semaine dernière par «Haaretz», 51% des Israéliens estiment que la conférence ne permettra pas d'accroître de façon significative les chances de parvenir à un accord permanent ».

Force est de convenir, comme le Nouvel Observateur que nous sommes encore loin d’Annapolis : « Les Palestiniens voudraient obtenir la libération d'un nombre substantiel de prisonniers - au moins 2 000 sur les 11 000 détenus dans les prisons israéliennes - et la levée d'un certain nombre de barrages en Cisjordanie. Les Israéliens, de leur côté, demandent que les Palestiniens combattent le terrorisme, se dotent d'institutions stables et s'engagent à reconnaître Israël « comme État juif », précaution destinée, selon eux, à verrouiller toute possibilité d'un retour des réfugiés palestiniens en Israël ».

____________________________