jeudi 10 mai 2007

Les pays en émergence pourraient menacer les pays industrialisés

« Si vous additionnez la Chine, l’Inde, la Russie et les pays du Golfe, vous dépassez les 2.000 milliards de dollars de réserves, ce qui est absolument considérable »


Stéphane Garelli, IMD


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L’École de commerce suisse IMD vient de publier son Annuaire 2007 de la compétitivité mondiale. Ce rapport fait autorité et analyse sur plusieurs centaines de critères la capacité des pays à offrir aux entreprises les conditions de création de richesses et d'emploi. Il se fonde sur 323 critères qui mesurent la manière dont les 55 économies évaluées créent et maintiennent des conditions favorables pour les entreprises. Les deux tiers de la note proviennent de statistiques pures (PIB, investissement, commerce) et pour un tiers des résultats d'une enquête d'opinion auprès de 3700 dirigeants du monde des affaires.


Selon Associated Press, les États-Unis conservent la palme de l'économie la plus compétitive au monde devant Singapour, Hong Kong, le Luxembourg et le Danemark, tandis que le Canada se classe au 10e rang et la France se classe 28e rang. Si la suprématie américaine a été confortée par le dynamisme de ses marchés boursiers, son économie a également pâti d'un déficit commercial record qui, combiné au déficit budgétaire, porte la dette nationale à 8700 milliards $ US. Les États-Unis ont quant à eux continué à perdre des points en matière d'efficacité administrative, de marché du travail, de gestion des entreprises, d'environnement et de système de soins.


Plombée par sa fiscalité et ses charges sociales, une faible croissance et sa législation du travail, la France n'émarge qu'à la 28e place du classement de 55 pays du monde pour la compétitivité de son économie. La France se retrouve derrière la plupart de ses voisins européens et juste après l'Inde, selon ce classement. Stéphane Garelli est le principal auteur du rapport : « pour la première fois depuis que nous faisons ce classement, aucun pays n'a été en récession l'an dernier et la moyenne des 55 pays dépasse 5%. Or la France est dans le peloton de queue", derrière des pays européens comme la Suède (4,4%) ou la Finlande (5,5%) ».


Si les Français ne s'en sortent pas trop mal pour leurs infrastructures (18e rang) et la performance économique (19e), ils tombent en revanche à la 42e place tant pour l'efficacité des entreprises que pour celle de l'État. Mauvaise note aussi en langues étrangères (45e), en économie (41e). La France se classe 20e pour son système éducatif. Elle est sauvée par les flux d'investissement à l'étranger (1ère) et les entrées d'investissements (3e).


L'environnement de chaque nation est étudié sous 4 facteurs, eux mêmes divisés en 5 sous-facteurs.


1. Economic performance


· Domestic Economy


· International Trade


· International Investment


· Employment


· Prices


2. Government efficiency


· Public Finance


· Fiscal Policy


· Institutional Framework


· Business Legislation


· Societal Framework


3. Business Efficiency


· Productivity


· Labor Market


· Finance


· Management Practices


· Attitudes and Values


4. Infrastructure


· Basic Infrastructure


· Technological Infrastructure


· Scientific Infrastructure


· Health and Environment


· Education


Les pays en progression par rapport à 2006


· 5e Danemark +2 rangs


· 6e Australie +3


· 9e Luxembourg +1


· 11e Irlande +1


· 12e Norvège +3


· 13e Autriche +4


· 16e Bavière +2


· 17e Japon +4


· 19e Chine +12


· 20e Estonie +6


· 28e Ile de France +5


· 29e Inde +10


· 30e Écosse +5


· 31e République Tchèque +5


Les pays en chute par rapport à 2006


· 7e Canada -2


· 10e Finlande -4


· 15e Pays-Bas -2


· 18e Taïwan -7


· 26e Allemagne -3


· 27e Belgique -3


· 35e France -5


· 56e Italie -3


Notons en conclusion qu’appuyé d’une équipe d’économistes de l'Institute for Management Development (IMD) de Lausanne, l’auteur du rapport, Stephane Garelli a, après avoir dressé le bilan des dix dernières années, servi une mise en garde suivant laquelle le fossé qui a longtemps séparé pays développés et monde en développement est bien en train de se réduire à vitesse grand V : « Même si les États-Unis restent le pays le plus compétitif, c'est-à-dire celui dont l'ensemble des infrastructures économiques offrent le meilleur potentiel à long terme, leur suprématie devient moins évidente ».


Les pays qui ont réalisé le plus de progrès sont la Chine, la Russie ou l'Inde. La Slovaquie, l'Estonie, la Suède ou encore Hong Kong font également partie de cet ensemble hétérogène de pays ayant sensiblement amélioré leurs positions au cours des dernières années. Des pays comme l'Italie et la France, l'Argentine, l'Indonésie et les Philippines se doivent de réagir car « ils perdront tôt ou tard leur standing ». La moyenne de la croissance des pays analysés par l'Institute for Management Development a dépassé les 5 % l'année dernière ! Difficile de résister quand on tourne autour des 2 %...


Comme le fait remarquer Stéphane Garelli, le monde en développement est également en train de déployer une puissance financière inédite : « Si vous additionnez la Chine, l'Inde, la Russie et les pays du Golfe, vous dépassez les 2.000 milliards de dollars de réserves, ce qui est absolument considérable ». L’auteur poursuit : « De plus en plus de pays créent donc des fonds publics d'investissement, à l'image de Temasek, à Singapour. La Chine vient d'annoncer la création du sien. Dubaï en a déjà deux. Avec de telles sommes, on peut imaginer que les acquisitions de sociétés occidentales se multiplieront, confirmant la tendance esquissée ces dernières années ».


Comme le note Le Devoir, de Montréal : « les pays industrialisés auront également de plus en plus de mal à tolérer la perte de joyaux économiques aux mains de pays émergents, comme on a pu le voir déjà avec la polémique provoquée par le rachat du métallurgiste européen Arcelor par l'indien Mittal ».


Sources : IMD, Agence France Presse, Associated Press, Le Temps, Le Devoir



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