« Les Américains trouvent toujours la meilleure option après avoir essayé toutes les autres. »
(Churchill)
Winston Churchill dirait-il du Québec d’aujourd’hui : « Les Québécois trouvent toujours la meilleure option après avoir essayé toutes les autres ? » J’en ai la profonde conviction : le Parti québécois vogue à la dérive dans un vieux rafiot dont le capitaine n’a plus aucune commande. Cela servirait à quoi de se donner le meilleur capitaine du monde s’il ne peut plus mouiller son vieux rafiot ? À soixante ans, et après quarante ans d’attente depuis la fondation du PQ, je n’ai plus de rêves pour le Québec. Mes idéaux ont fondu comme neige (28 pour cent des votes, 36 députés). Il appartient maintenant à la nouvelle génération de décider l’avenir du Québec dans lequel elle voudra vivre et dans lequel elle voudra que les générations futures vivent. Il faut avoir la modestie de se retirer avant le naufrage pour passer la main à de nouveaux savoir-faire.
La première question qu’il conviendrait de se poser est la suivante : « De nouvelles élections sont-elles prévisibles à court ou moyen terme au Québec ? ». Monsieur Boisclair, en remettant très tôt sa démission, a rendu un service important au Parti québécois : la gestion du temps. Pourquoi diable ce parti vit-il à grande vitesse et se comporte-t-il comme si l’Apocalypse était imminente ? Quelle urgence y a-t-il de convoquer un congrès du parti pour le choix d’un chef ?
Le Parti québécois est exsangue d’idées. Il fait du sur-place depuis ces dernières années. La dernière course à la chefferie a été une catastrophe. L’action semble toujours précéder la réflexion au sein de ce parti politique. Une fois l’action posée, force est de constater qu’elle ne donne pas les résultats escomptés.
La plus grave erreur du Parti québécois a été son absence de réalisme et d’ancrage face à l’évolution qu’il est sensé représenter. Son programme politique ne repose plus qu’entre les mains d’un petit groupe d’idéologues qui n’ont pas dépassé les années 1970. L’idéalisme et l’angélisme n’ont jamais pu être évacués – tant les idéologues ont une forte mainmise sur le parti – pour faire place à des idées nouvelles qui ne sont pas automatiquement excommuniées par les ultra-orthodoxes de l’organisation.
Pourquoi encore une fois diable cette urgence à organiser des élections ? Pour assister à nouveau à de vieilles déclarations décousues, idéalistes et tellement éloignées de la réalité québécoise ? Non merci. Pour donner à deux personnes, trois ou quatre au plus, une tribune médiatique qui relaiera encore une fois davantage de faits divers et d’anecdotes inintéressantes que les orientations profondes et les aspirations légitimes d’un peuple ?
Avant d’élire un chef, le temps permet de mettre en place un congrès d’orientation qui ne soit pas sous contrôle des dinosaures du parti. Le temps permet de « prendre le temps » de réfléchir et de s’interroger sur les aspirations de la population québécoise et d’adopter une plateforme politique réaliste qui n’est plus le fait d’un débat antédéluvien sur la tenue d’un nouveau référendum ou non, émanant d’un groupuscule fossilisé mais bien d’une consultation populaire élargie à l’image du pays que le Québec souhaite se donner. Le peuple – portion négligeable depuis ces dernières années au sein des dinosaures du Parti québécois – pourrait-il avoir droit de cité ?
Ne nous donnez pas encore une fois un triste spectacle de guerres internes, de tractations ésotériques entre des forces occultes pour satisfaire les uns et déplaire aux autres. Le Parti québécois s’oriente résolument vers une décadence et une déchéance inexorables en ne tablant pas sur une évaluation complète de sa conception fondamentale du Québec libre et en évitant de s’ouvrir aux nouvelles tendances.
Ne nous donnez pas le spectacle de la chute inexorable du Bloc québécois parce que des stratèges auront cru qu’en le rendant exsangue, ils vont pouvoir mieux asseoir l’avenir du Québec. Je suis simplement fatigué de ces visions à courte vue qui ne font que rendre la cause de la souveraineté plus agonisante que jamais. La gestion par le vide semble être désormais l’option privilégiée par le Parti québécois. Cette triste réalité me rend plus pessimiste que jamais.
Le chef par intérim actuel, monsieur François Gendron, vieux routier de la politique, peut très bien s’acquitter de ses responsabilités à l’Assemblée nationale. Y faire asseoir un nouveau chef ne changera rien à la donne actuelle et à la débandade du PQ. Le parti libéral du Québec serait bien mal avisé de déclencher maintenant des élections qui l’enfonceraient davantage dans les abîmes.
Je vais poser une question sacrilège ? Faut-il fonder toute la politique du Parti québécois sur la notion de référendum ? Ce discours à satiété a eu un effet de répulsion en lieu et place d’un facteur de rassemblement. Et parce que le Parti québécois est sclérosé au point de ne s’en tenir qu’à un programme éculé, inefficace, invendable, il court à sa propre perte. Il est impératif que le Parti québécois mette en place maintenant, et non après une élection inutile et improductive, un congrès d’orientation et qu’il vite une grande partie de la population à venir débattre de son avenir, de l’avenir de sa plateforme actuelle, de son évolution à court ou moyen terme, et de ses options pour parvenir à la souveraineté du Québec.
Ce ne sera pas dans les officines de madame Marois et de monsieur Duceppe que le Parti québécois évoluera. Les tractations à savoir qui se positionnera le premier ou le dernier n’intéresse en rien la population du Québec. Les dernières élections provinciales en sont un témoignage absolu. Monsieur Boisclair n’a jamais été un choix que j’aurais privilégié. Cependant je dois lui accorder le mérite d’avoir soulevé la question fondamentale d’une remise en cause des orientations actuelles du parti et une ouverture possible pour l’adoption d’une vraie plateforme politique qui réponde aux aspirations du peuple.
Madame Marois, monsieur Duceppe, pas maintenant, merci. Revenez après la tenue d’un congrès organisé par ou pour le peuple du Québec. Si vous êtes, par la suite, à l’aise avec cette nouvelle plateforme, vous vous présenterez à la chefferie du parti. Si le Parti québécois n’a plus l’audace de se renouveler, pourquoi la population lui renouvellerait-elle sa confiance ?
Chaque fois que vous voyez une entreprise qui réussit, dites-vous que c’est parce qu’un jour quelqu’un a pris une décision courageuse, écrivait Peter Drucker. Il est encore temps de réussir.
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Première mise à jour :
Pour le bénéfice des lecteurs
Selon un sondage Unimarketing réalisé pour La Presse, avec la course qui débute entre Pauline Marois et Gilles Duceppe, un Québécois sur deux pense que les déchirements actuels au PQ peuvent mener à son éclatement. Parmi les électeurs qui ont voté pour le PQ le 26 mars, 40 % ont la même préoccupation. 71 % des gens pensent que le PQ est la source de ses déchirements. Les militants sont accusés par 43 % des répondants ; les députés et les ténors de l’aile gauche, respectivement par 16 et 12 % des gens. Enfin, 9 % des sondés croient qu’André Boisclair est la source des querelles au PQ.
Ainsi, 66 % des répondants estiment que le PQ ne devrait pas s’engager à tenir un référendum au cours d’un premier mandat. C’est beaucoup plus partagé au PQ : 48 % des péquistes veulent renoncer à cet engagement et 47 % souhaitent le maintenir.
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Deuxième mise à jour :
A tous
Le candidat Gilles Duceppe, qui avait annoncé sa décision de se lancer dans la course vendredi, a décidé de retirer sa candidature aujourd’hui samedi et donne du même coup son appui à Pauline Marois. La Presse
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Troisième mise à jour
Dernière heure : mais quel gâchis !
À la Chambre des communes, le chef du Bloc québécois risque d’être la cible de railleries de la part de ses adversaires politiques. Déjà, le député libéral Denis Coderre a déclaré que Gilles Duceppe a manqué de courage et qu’il devrait maintenant faire ses adieux au Bloc. [...] M. Duceppe a indiqué qu’il se soumettra, dès lundi matin, à un vote de confiance des députés bloquistes. (Cyberpresse, Presse canadienne, dimanche 13 mai 2007)
a) Denis Coderre n’a pas de leçon de crédibilité à distribuer mais Glles Duceppe doit revoir ses critères de bon jugement !
b) Qu’en pensera la population, monsieur Duceppe ? Votre députation est secondaire. La population est celle qui vous a élu !
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Quatrième mise à jour
Au vu et au su de tous les Québécois, Gilles Duceppe vient d’être honteusement rejeté par les siens. [...] En réalité, c’est le début de la fin pour lui. Tout le monde avait compris qu’il estimait personnellement qu’il ne lui restait plus rien à piétiner dans le jardin fédéral. Après l’amère déception d’avoir attendu en vain un signal des péquistes lors du départ de Bernard Landry en 2005, cette fois-ci, c’était son tour. Il devait au moins être au plus fort de la course. L’Assemblée nationale était l’aboutissement logique de son parcours. Il vient de constater qu’il aurait peut-être mieux valu pour lui de prendre le temps de mesurer la profondeur de l’eau avant d’y rêver ouvertement. [...] Tous les commentaires entendus hier en provenance de la famille souverainiste louant son courage, son sens des responsabilités et son abnégation sonnaient un peu faux. Du côté des élus péquistes, on était sans doute content dans bien des cas de voir le petit préfet de discipline se faire bouder par un peu tout le monde. Quant aux collègues bloquistes, plusieurs d’entre eux regrettent assurément qu’après 10 ans passés sous la férule du député de Laurier-Sainte-Marie, l’opération dépoussiérage soit remise sine die (Pierre-Paul Noreau, Le Soleil, dimanche 13 mai 2007)
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