mercredi 30 mai 2007

Chavez, en privant son peuple, prend le risque de le diviser davantage

Je recommande que Globovision prenne un tranquilisant, qu’elle ralentisse, sinon je vais la faire ralentir (Hugo Chavez). Globovision est une des dernières chaînes encore opposées au gouvernement. Hugo Chavez qui se voit président à vie prend le contrôle des médias.

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Mérida, ville universitaire, en réalité deuxième ville étudiante du Venezuela, est connue pour l’un de ses plus célèbres établissements d’enseignement, l’Université des Andes, mieux connue par son acronyme en espagnol ULA, qui est aussi un centre d’études fréquenté par de nombreuses personnalités de la région. La Cathédrale de Mérida également est une des plus belles églises du Venezuela, bien que son style ne puisse appartenir à une école architecturale particulière. De cette ville, Baltasar Porras Cardoso y accuse le président Hugo Chavez d’adopter des attitudes totalitaires comparables à celles d’Adolf Hitler, Fidel Castro ou Benito Mussolini. Cette sortie a marqué la cessation des émissions de la plus ancienne télévision du Venezuela, RCTV. Baltasar Porras Cardoso n’est pas un citoyen ordinaire. Il est l’archevêque de Mérida : « Aujourd’hui, on qualifie de délit ce qui dans n’importe quelle société est le droit de ne pas être d’accord, de donner son opinion, de s’exprimer de manière différente de celle du gouvernement ».

Depuis l’arrivée de Chavez au pouvoir, il y a huit ans, l’Église vénézuélienne a fait une cinquantaine de discours en faveur des libertés individuelles et contre «l’autoritarisme». Le sectarisme de ce gouvernement restreint de plus en plus l’espace de ceux qui ne sont pas totalement alignés, se plaint l’archevêque de Mérida, évoquant même un certain harcèlement de la part d’Hugo Chavez et de ses partisans.

La télévision la plus ancienne du Venezuela, RCTV (Radio Caracas Television), dernière grande chaîne d’opposition du pays, a cessé d’émettre une seconde avant minuit, après cinquante-quatre années d’existence, à l’expiration de sa concession que le gouvernement d’Hugo Chavez a refusé de renouveler.

Pour le président du Venezuela, cette fermeture était rendue impérative en raison du ton acerbe de ses journaux et de son soutien au coup d’État avorté à son encontre en 2002. RCTV, à ses yeux, n’était qu’une menace pour le pays. Le président avait également un compte à régler avec cette chaîne de télévision en raison de l’appui de cette dernière au coup d’État avorté contre lui en 2002. Il avait alors, après sa réélection en décembre, qualifié cette télévision « putschiste » parce que la chaîne avait fait campagne contre lui.

Le dimanche 27 mai, avant l’arrêt des opérations sur le coup de minuit, une grande partie des 3.000 salariés de RCTV s’étaient rassemblés sur le plateau entonnant des chants appelant à l’union et l’amitié. Plusieurs ne pouvaient retenir leurs larmes se réclamant du même espoir que le président de la chaîne, Marcel Granier, qui se déclarait sûr que « la démocratie et RCTV reviendront au Venezuela ». Une partie des 2.500 employés de la plus ancienne chaîne du pays, fondée en 1953, continueront à produire des « telenovelas » à destination d’autres groupes de télévision latino-américains.

À l’extérieur, des partisans d’Hugo Chavez tiraient des fusées de feu d’artifice pour célébrer pour célébrer la naissance de la nouvelle chaîne de « télévision socialiste » (TVES), financée par le gouvernement et dont les transmissions ont commencé dès que se sont interrompues celles de RCTV. RCTV est mort, vive TVES !

Plus de 70% des Vénézuéliens désapprouvent la fermeture de RCTV, une chaîne très populaire pour ses programmes de divertissement connus dans toute l’Amérique latine.

A l’étranger, la présidence allemande de l’Union européenne a exprimé son « inquiétude », rappelant que « la liberté de parole et la liberté de presse sont des éléments essentiels de la démocratie ». « L’Union européenne attend du Venezuela qu’il protège ces libertés et soutienne le pluralisme dans la diffusion des informations », indique un communiqué. Le président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, a refusé de prendre position sur la question : « La décision du président Hugo Chavez est un problème interne du Venezuela, de la même manière que je ne veux pas qu’ils donnent leurs avis sur les choses que je fais ici ». Les pays associés au Venezuela au sein du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) avaient refusé la semaine dernière d’appuyer la mesure annoncée par Hugo Chavez, lors d’une réunion au niveau des ministres des Affaires étrangères tenue à Asuncion (Agence France-Presse).

Michelle Bachelet a évoqué la dictature du général Augusto Pinochet au Chili (1973-1990), affirmant que « eu égard à son histoire politique, pour le Chili, la liberté d’expression est la règle d’or ». En réaction à la fermeture au Venezuela d’une chaîne de télévision d’opposition au président Hugo Chavez, « La liberté d’expression est la règle d’or », a répété la présidente du Chili Michelle Bachelet. La présidente de la Finlande, Tarja Halonen, a pour sa part indiqué à Helsinki suivre « ce qui se passe à Cuba et au Venezuela avec beaucoup d’intérêt et parfois avec préoccupation », estimant que la communauté internationale devait être « ferme et encourageante à la fois ».

Le quotidien El Nacional estime que cette mesure marque la « fin du pluralisme » dans le pays. Le Sénat américain, l’Organisation des États Américains (OEA) ou encore le Parlement européen ont également exprimé leur préoccupation quant à la disparition de la chaîne, soutenue par les associations internationales de défense des médias. Hormis les journaux et les radios, l’opposition ne dispose plus que de la station Globovision, captée seulement dans la capitale ou par le câble, pour faire entendre sa voix à l’écran.

Plusieurs organisations internationales de défense des médias, comme Reporters sans frontières, ont également apporté leur soutien à la chaîne. De son côté, le président de RCTV, Marcel Granier, a soutenu que Chavez, un allié du dirigeant cubain Fidel Castro, était mu par « la volonté mégalomaniaque d’instaurer une dictature totalitaire ».

Pour Ewald Scharfenberg, directeur de l’Institut Presse et société : « l’annonce du non-renouvellement de la concession de RCTV n’a pas été prononcée par la Commission nationale des télécommunications (Conatel) mais par le président depuis la plus importante place militaire ». Le spécialiste des médias croit qu’il reste encore au Venezuela « beaucoup de marges de liberté », notamment les médias régionaux et alternatifs comme ceux d’internet.

C’est avec la chemise rouge de ses partisans que le président Chavez s’est adressé au pays, pendant trois heures, lors de l’inauguration d’un centre de santé à Barquisimeto. Afin de prévenir de possibles troubles, la Cour suprême avait ordonné dans son arrêt rendu public le vendredi précédant la fermeture de RCTV que l’armée prenne provisoirement position devant les locaux de la station.

Comme l’écrit Le Monde : « lorsqu’il parle en public, deux ou trois fois par semaine, toutes les chaînes de télévision et stations de radio doivent interrompre leur programmation et transmettre intégralement, en direct, les paroles du chef de l’État. La disparition de l’antenne de Radio Caracas Television a commencé par une harangue militaire et a fini par une opération de l’armée. L’utilisation de l’armée reflète, non seulement le style du « comandante » Chavez dans l’exercice de la présidence de la République, mais aussi la présence croissante des militaires dans son gouvernement, dans les programmes sociaux - les « missions » - et dans les entreprises publiques ».

Le chef de l’État a réfuté toute atteinte à la liberté de la presse : « Il n’y a pas de pays au monde où la liberté d’expression est aussi grande », a-t-il assuré.

Depuis dimanche, la situation reste tendue au Venezuela. Dans un discours radio-télévisé, M. Chavez a réaffirmé avoir pris une « mesure souveraine et légitime », en refusant de prolonger la licence de RCTV, remplacée dimanche par une « chaîne socialiste » TVES, financée par l’État. Rien n’y fait. La population ne décolère pas. Une manifestation a rassemblé lundi jusqu’à 5.000 personnes et a été dissoute par les forces de l’ordre, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. Les manifestants se sont ensuite rassemblés sur la place Brion de Caracas, scandant « Liberté! », ce qui a entraîné de nouveaux tirs de gaz lacrymogènes par la police. Mardi, des milliers d’étudiants ont manifesté à Caracas et dans d’autres villes du pays, au lendemain des heurts avec la police qui ont fait 17 blessés dans la capitale. Les États-Unis ont réagi mardi en demandant au régime vénézuélien de revenir sur sa décision. « La liberté d’expression est d’un droit de l’Homme fondamental ».

Le dirigeant vénézuélien, qui ne s’était pas exprimé depuis la disparition de cette chaîne, a appelé ses partisans à « défendre la révolution contre cette nouvelle attaque fasciste » dans un discours diffusé à la radio et la télévision. Des étudiants - partisans du chef de l’État - issus de la nouvelle Université Bolivarienne créée il y a trois ans, vêtus pour la plupart de chemises rouges, la couleur emblématique du régime, ont manifesté leur soutien à la nouvelle chaîne officielle TVES et ils ont défilé jusqu’au palais présidentiel de Miraflores (Agence France-Presse).

Chavez a également profité de l’occasion pour mettre en garde Globovision - une des dernières chaînes encore opposées au gouvernement - contre d’éventuelles sanctions.

Conclusions

Seul l’avenir pourra dire si la décision d’Hugo Chavez aura un impact sur la confiance que lui a témoigné le peuple lors des dernières élections. En décembre dernier, les partisans du président Hugo Chavez avaient affirmé avoir remporté une victoire totale au Parlement du Venezuela, succès aussitôt qualifié d’ « illégitime » par l’opposition qui avait boycotté ces élections législatives, marquées par une forte abstention. Depuis le 1er février 2007, et après que le parlement vénézuélien lui en ait officiellement accordé les pleins pouvoirs lors d’une cérémonie solennelle, Hugo Chavez, un dirigeant ouvertement anti-américain et partisan de l’instauration du socialisme, est autorisé en vertu de la loi dite « d’habilitation » à gouverner par décrets pendant une période de 18 mois. Il s’est engagé à réformer la Constitution pour pouvoir se présenter indéfiniment et renforcer le contrôle de l’État sur l’économie. À peine trois semaines après sa réélection en décembre, le dirigeant socialiste, au pouvoir depuis 1999, avait annoncé qu’il mettait fin à la licence de Radio Caracas Television (RCTV) en vigueur jusqu’au 27 mai.

Hugo Chavez accélère la prise de contrôle de secteurs stratégiques tels l’électricité ou les télécommunications. Il accroît la participation de l’État dans les gigantesques gisements pétroliers de l’Orénoque jusqu’à présent aux mains de multinationales étrangères. C’est l’une des facettes du virage antilibéral de Chavez qui a, depuis, annoncé la sortie du Venezuela du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, qualifiés de « mécanismes de l’impérialisme » pour exploiter les pays pauvres.

Ces changements sont minimes par rapport à l’ensemble des transformations que Chavez envisage pour le futur du Venezuela. Pourra-t-il mettre en place les cinq moteurs (ainsi qu’il les qualifie) de son nouveau socialisme vénézuélien :

  • 1e moteur : la loi hablitante, voie directe au socialisme ;

  • 2e moteur : la réforme constitutionnelle : état de droit socialiste ;

  • 3e moteur : morale et lumières, éducation basée sur des valeurs socialistes ;

  • 4e moteur : la nouvelle géométrie du pouvoir, la réorganisation socialiste de la nouvelle géopolitique de la nation ;

  • 5e moteur : explosion du pouvoir communal, démocratie protagonique, révolutionnaire et socialiste.

À priver le peuple de ses libertés et de ses choix (comme il en fut question avec la disparition de Radio Caracas Television), rien n’est moins sûr.

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